Historique

Le château de Villeneuve  
à Martigné Briand _ Terranjou

Dessin d’André Sarazin, 1977

Le toponyme Villeneuve, « villa nova » comme tant d’autres domaines en Europe occidentale, peut nous renvoyer à une installation gallo-romaine. Le domaine est situé à la frontière du pays angevin et du Poitou séparés par la rivière Le Layon, aujourd’hui célèbre pour ses coteaux viticoles.
La dénomination « La Barre », actuel monastère de sœurs bénédictines qui jouxte l’enceinte du château, peut renforcer la notion d’existence d’un ancien lieu fortifié.
Ce n’est qu’à partir du XIIIe siècle que l’existence sinon du château, tout au moins d’une famille de Villeneuve est avérée, ce qui nous permet de donner les repères chronologiques suivants. Malheureusement ceux-ci ne nous apportent pas d’informations précises sur les dates de construction des bâtiments.

1235    : Première mention manuscrite de la famille de Villeneuve.

1272 (19 janvier) : Décès de Yolande de Villeneuve, femme d’Herment d’Aubigné, seigneur de Saint Mars de Coutai. Leurs tombeaux ainsi que celui de leurs fils étaient encore visibles au XVIIe siècle dans la chapelle Saint Sébastien du château de Villeneuve. (cf 1695) (selon le dictionnaire historique, géographique du Maine et Loire de Célestin Port

XIIIe siècle : La seigneurie relève du château de Vezins.

1371 (8 décembre) : Emery de Villeneuve vend au chapitre de la cathédrale d’Angers, une rente sur un fief et sur les dimes qu’il lève dans la paroisse de Louresse.
Son épouse est Marguerite de Coulaines. Leur fils Jean I se maria deux fois : à Jeanne de Daillon puis à Aliénor de Chausseray, dame de Lespaye. Du premier mariage, il eut Jean II de Villeneuve, chevalier, qui mourut avant son père.

1430  : Jean II de Villeneuve épouse Simone de la Béraudière. Ils eurent deux fils et deux filles. Il est dit que Mme de la Béraudière, devenue veuve, gouverna fort bien sa maison de Villeneuve.

 1470  : Jean III de Villeneuve épouse Catherine Aménard de Chanzé, alliant ainsi la famille de Villeneuve aux Noyers-Aménard, du fief voisin des Noyers. Ils eurent cinq fils et quatre filles. L’ainé, Christophe, se tua à cheval lors d’une chasse avec le maréchal de Gié, Pierre de Rohan. Jean III mourut en 1497 à 70 ans.

1503  : Jean IV de Villeneuve épouse Catherine de Saint Flayve. Il décède en septembre 1517 en laissant deux enfants, Jean V et Marguerite. Mme de saint Flayve se remaria en 1519 avec le seigneur d’Aubigné, sgr de la Jousselinière et administrera Villeneuve jusqu’à la majorité de son fils en 1526.

1551   : Jean V de Villeneuve épouse Catherine de Daillon, sa cousine, héritière du château des Noyers. Il mourut en 1550 (avant sa mère)

1603   : Jean VI de Villeneuve, gentilhomme de la chambre d’Henri IV, chevalier de l’Ordre du Saint Esprit. Il avait épousé Jeanne de Chivré dont il a eu une fille qui se maria avec louis de Daillon. Il sera le dernier de la branche ainée des Villeneuve car la branche cadette des Villeneuve du Cazeau se perpétuera plusieurs siècles. Une tradition rapportée à Raimbault par Frouin le 25 mai 1847, prétend que pendant les guerres de religion, il se fit enfermer dans ses caves avec ses trésors. Décédé en Poitou, il fut ramené dans sa chapelle de Villeneuve le vendredi 4 avril 1603 et enterré dans l’église de Martigné Briand le dimanche 6 avril suivant.

1640  : Les seigneuries de Villeneuve et des Noyers appartiennent à Pierre Chevrier, conseiller et maitre d’hôtel du roi.

1690   : Le domaine appartient à Jean Thibaudeau, chirurgien à Martigné Briand. La chapelle Saint Sébastien est transférée en l’église Saint Simplicien de Martigné.

1695   : Louis Boudan exécute cinq dessins pour la célèbre collection de Gaignieres (1642-1715). Il s’agit de dessins à la plume et encre de Chine, lavis d’encre de Chine, aquarelle et gouache conservés à la Bibliothèque nationale de France. Ceux-ci représentent les vitraux et les pierres tombales gravées de Yolande d’Aubigné (décès le 19 janvier 1272), de son mari Herment d’Aubigné en armure (mort en 1782) et de leurs deux fils « qui revenant de la Croisade se noïerent pres de chez eux en voulant abreuver leurs chevaux a l’estang de Grand-Lieu ». Ces tombeaux se trouvaient dans la chapelle particulière d’Aubigné de la chapelle Saint Sébastien à Villeneuve.

1727    (15 décembre) : Acquisition « de la maison noble, terre et seigneurie de Villeneuve»  (et également de celui des Noyers) par Pierre-Nicolas Parant, pour 75000 livres, auprès de Henry de Cresme, ancien capitaine au régiment du Piémont et contrôleur vétéran de la maison de France. (avec caution de ses proches parents). N’ayant que 24 ans, il donne procuration à son épouse Marie Sallot. Après sa majorité, la vente est ratifiée  le 19 mai 1728. Il devient par la suite trésorier de France au bureau des finances de la généralité d’Alençon. Il achètera la seigneurie de Martigné Briand à la Duchesse de Brissac, le 17 janvier 1739.

1752    : Les propriétés de Parant lui sont saisies pour une dette envers l’hôtel Dieu d’Angers puis restituées.

1757    : Parant vend Villeneuve à sa femme Marie Louise Sallot (en même temps que les châteaux de  Martigné Briand et des Noyers). Celle-ci cède le 15 juin 1778 ses biens à Charles-Antoine-Etienne marquis de Choiseul, mais en conserve l’usufruit.

1779  (Septembre) : Marie Madeleine Cerisier, cousine de la précédente, obtient le retrait lignager. Après le décès de Pierre-Nicolas Parant, le 23 mars 1179 et de Marie-louise Sallot le 26 juin 1782, l’usufruit échut à Nicolas Parant de Villeneuve, leur fils.

1782 (30 septembre)   : Revente de ces biens à Jean-Moïse et Louis Beguyer, négociants à Nantes  et à Pierre Boreau de la Besnardière, officier de la chambre du Duc d’Orléans.

mai 1788 : Devis de restauration exécuté par Etienne François Chentrier et René François Delaunay, tous deux architectes, à la demande de Mme veuve Boreau de la Besnardière. Ils décrivent les bâtiments dans un état déjà pitoyable : « le château est de la plus haute antiquité … et négligé depuis un temps immémorial ».

avril 1791 :  le château de Villeneuve est vendu « bien national ».

Pierre Boreau de la Besnardière (décédé le 29 mai 1783) l’avait transmis à son fils pierre Lezin Boreau de la Besnardière ( 1768/1823), baron d’Empire et maire d’Angers de 1808 à 1813.

1814   : Sa fille Raymonde Etienne épouse Félix Duplat de Monticourt fils du directeur des fermes royales de Laval. Le domaine fut ensuite transmit à leur fils Félix Raymond. Puis leur fils, le baron Duplat de Monticourt, le lègue à la princesse Simone de Croÿ.

1870  : la chapelle est transformée en écurie.

1890  : Découverte par J. Merlet, à la Barre, d’une urne contenant 500 deniers de Billon dont le plus récent est de 1350.

1977 (18 juin) : André Sarazin, conservateur des archives de Maine et Loire, vient à Villeneuve, dans le cadre de ses ouvrages sur les demeures de l’Anjou (cf. son dessin en début de texte). Il écrit : « C’est encore un chef d’œuvre en péril que je voudrais vous décrire aujourd’hui, une de ces belles vieilles maisons du passé, peuplées d’ombres, pleines d’un charme quasi magique, demeures de la Belle au bois dormant rendues plus saisissante encore par l’abandon et qui attendent que leur vie leur soit rendue… »

3 décembre 1986 : Conscients du grand intérêt archéologique et architectural de l’ensemble, passionnés du moyen-âge et fous du Patrimoine, Martine et François Vandangeon acquièrent le château de Villeneuve auprès du prince François Emmanuel de Croÿ, fils de Simone de Croÿ.

1987    : Début des études de restauration. Choix de l’architecte : François Terrien, architecte rue Dulong à Paris

1988    : Début des travaux de terrassement (mai), premières plantations (novembre)

29 août 1991  : Journée d’action culturelle des VMF du Maine et Loire. René Combres, dans « Balade en Anjou avec les VMF » écrit : «  Il fallait du souffle, du courage et de la patience aux époux Vandangeon,  pour acquérir en 1986, ce grand logis laissé dans un état de négligence depuis la fin du XVIIIe et œuvrer depuis à sa restauration. »

8 avril 1992   : Inscription des bâtiments sur l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

1994 (7 décembre) : Visite de Mr Robert Jourdan, conservateur régional des Monuments historiques, Mme Nicole Lambert, chef du service régional de l’archéologie, de Mr Dominique Latron, Architecte des bâtiments de France et Mr Hughes Poulain, ingénieur du patrimoine vérificateur des bâtiments de France afin de définir les travaux.

1995 (février à mars)  : Sondages archéologiques par l’AFAN.


Dessins de Emile sans Epée, architecte

Ainsi quatre époques principales caractérisent le logis :

Une première époque, sans doute au milieu du XIIIe jusqu’au XIVe voit l’édification d’un « château » avec chapelle dans une enceinte close. De ce premier établissement subsiste le châtelet, les murs de la chapelle, une partie des bâtiments de service, quelques murs du logis et les caves.

La seconde époque, au XVe, voit la transformation du logis en « villégiature ». Les travaux sont menés en plusieurs étapes mais dans une période resserrée.

La troisième époque au XVIIe, correspond à la transformation du logis « entre cour et jardin » par la suppression de la galerie au nord et l’abandon de l’escalier à vis. Un escalier droit rampe sur rampe est construit, sans grands moyens financiers, dans le corps du logis en démolissant la cheminée du rez de chaussée. Un perron sommaire permet d’accéder au demi-palier de cet escalier. Vraisemblablement ces travaux provoqueront la chute du retour d’angle du bâtiment et du pignon ouest.

Enfin, la quatrième époque, de 1782 à nos jours, est celle de l’abandon du logis et de sa transformation en exploitation agricole avec les démolitions que cela peut impliquer.

Villeneuve : De gueule à trois chevrons d’argent chargés de quinze mouchetures d’hermines de sable posées sept sur le premier chevron, cinq sur le deuxième et trois sur le troisième.

Bibliographie :

– Archives départementales de l’Anjou, séries B (1B1000 pour le devis de 1788), D, E et I.

– Archives départementales de la Vendée, série 22J36 (généalogie des Villeneuve)

– Archives nationales ET/LX/239

– Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, BnF, Est. RESERVE PE-2-FOL

– B. Barreault et F. Vandangeon, D’hier à demain Martigné Briand, Hérault éditions, Maulévrier, 1984, 237 p.

– R. Combres et E Sans Epée, Balade en Anjou avec les VMF du Maine et Loire, éditions d’ICI, Beaupreau, 2008, 200 p.

– V. Manase, V. Orain, C.  Cussoneau, La maison seigneuriale dans l’Est de l’Anjou, Maine et Loire. Service départemental de l’inventaire, Archives départementales, Angers, 1990, 31 p.

– C. Port mise à jour par A. Sarazin, Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine et Loire, TIV, éditions Siraudeau, Angers, 1996, 835 p

– A. Sarazin, Vieux logis en Anjou, éditions Farré, Cholet, 1979, 179 p.

– E. Zeimert, J. Cornec, Sondages archéologiques à Villeneuve, AFAN, SRA Pays de la Loire, 1995

François Vandangeon, 2024